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La liberté syndicale du personnel enseignant: au sujet d'une recommandation de l'OIT/Unesco

par Jean-Bernard Gicquel


Pour l'auteur, la Recommandation concernant la protection du personnel enseignant(1966) continue de nos jours d'être un instrument essentiel à la promotion et à la défense des droits syndicaux dans le domaine de l'enseignement. Le texte qui suit en présente les principales dimensions.



Les origines

Le droit à l'éducation, tel que proclamé dans la Déclaration universelle des droits de l'homme(1948) stipule, à l'article 26, que l'enseignement élémentaire doit être gratuit et obligatoire et que l'accès aux études supérieures doit être ouvert en pleine égalité à tous en fonction de leur mérite. A l'époque de l'adoption de cette déclaration des Nations Unies, l'école primaire gratuite n'était pas répandue et l'analphabétisme constituait un problème mondial considérable. Le gouffre était très large entre les principes de la Charte de l'ONU et la réalité, et les auteurs savaient qu'une tÅche gigantesque attendait la nouvelle Organisation.

C'est pourquoi, au cours des années '50 et '60, l'Unesco s'est employée à mobiliser les énergies des organisations professionnelles d'enseignants. Ces efforts aboutirent et l'année 1996 marque le 30ème anniversaire de l'adoption de la Recommandation concernant la condition du personnel enseignant.

Cette recommandation, adoptée à Paris le 5 octobre 1966, est issue d'un travail conjoint de l'Unesco et de l'OIT. Les représentants des organisations internationales de l'enseignement y ont apporté un concours important.

‚La conditioné appliquée aux enseignants désigne, selon la définition de la recommandation de l'OIT/Unesco, "à la fois la position qu'on leur reconnaät dans la société, selon le degré de considération attachée à l'importance de leur fonction, ainsi qu'à leur compétence, et les conditions de travail, la rémunération et les autres avantages matériels dont ils bénéficient, comparés à ceux d'autres professions".

D'un point de vue formel, cette recommandation est un instrument de l'Unesco. Par ailleurs, près de la moitié des 146 dispositions relatives aux conditions de travail et de vie des enseignants sont du champ de compétence de l'Organisation internationale du travail. Le Comité d'experts chargé de la mise en oeuvre de la Recommandation est composé de personnes désignées par l'Unesco e de l'OIT. Il se réunit tous les trois ans et ses rapports sont publiés.

La Recommandation reprend les principales normes des conventions de l'OIT, mais elle va beaucoup plus loin dans le détail car elle s'applique spécifiquement au personnel enseignant.

Se protéger des violations

Le texte de cette recommandation couvre toutes les questions qui concernent les enseignants dans le cadre de leur profession; il repose sur trois convictions fondamentales: i) une bonne éducation est nécessaire à la réalisation du bonheur individuel, à la prospérité nationale et à l'entente internationale; ii) la qualité de l'enseignement dépend des compétences et du dévouement des enseignants; iii) il n'est possible de recruter et de conserver des enseignants compétents que si leur profession et leur statut économique sont respectés par la société.

La première mesure prise après l'adoption de la recommandation fut d'effectuer une étude sur la condition des enseignants dans le monde. En conséquence, l'OIT et l'Unesco créèrent un comité conjoint d'experts sur l'application de ladite recommandation concernant la condition du personnel enseignant (CEART) pour réaliser cette tÅche.

Procès-verbal après procès-verbal, les conclusions du Comité d'experts montrent clairement que la condition des enseignants continue de se dégrader. Trente ans après l'adoption d'une recommandation conçue pour redresser la situation dans l'enseignement, les gouvernements du monde ne se décident toujours pas à réaliser les investissements indispensables. De moins en moins de jeunes, d'ailleurs, sont attirés par l'enseignement, car ceux qui sont déjà engagés dans la profession n'y trouvent pas une reconnaissance analogue à celles d'autres secteurs de l'économie.

Au cours de ses entretiens avec les organisations intergouvernementales et gouvernementales, l'Internationale de l'éducation souligne constamment sa préoccupation concernant la détérioration globale des conditions de travail des enseignants, y compris le nombre croissant de violations de leurs droits syndicaux.

Le Secrétariat a reçu un grand nombre de rapports provenant de toutes les régions, y compris des pays de l'Organisaition pour la coopération et le développment économique(OCDE), décrivant en détail comment les gouvernements tentent de limiter les droits, de redistribuer les ressources de l'éducation en aggravant les conditions de travail des enseignants ou en réduisant les dépenses d'éducation.

Dans le cas de violation d'une convention de l'OIT, les plaintes officielles sont déposées. Le Conseil d'administration de l'OIT est préoccupé par le nombre de violations qu'il examine concernant les enseignants. C'est une bonne raison pour que l'I.E. continue de promouvoir la recommandation dans le cadre de son programme d'activité.

Un outil à utiliser

Cette recommandation demeure pour nous un excellent outil de formation syndicale et de négociations des syndicats avec l'Etat- employeur. Elle facilite l'élaboration de la plate-forme des revendications syndicales, la détermination des objectifs syndicaux prioritaires, et l'ouverture de négociations avec les ministres de l'Education, de la Fonction Publique et des Finances.

Au coeur de toutes ces actions, le texte de la recommandation est, et demeure, un atout dans les mains des dirigeants syndicaux

 

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