Centre international de formation pour l'enseignement des droits de l'homme et de la paix
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L'éducation aux droits de l'homme: approches socio-pédagogiques
Par Saliou Sarr
I. Éléments de problématique
L'école sénégalaise subit des agressions multiples dont le résultat négatif rejaillit sur l'ensemble du système.
Agrave; titre d'exemples, citons:
Face à tous ces problèmes, les enseignants doivent faire preuve d'imagination et initier des approches à la fois novatrices et respectueuses de l'enfant.
II. Quelques approches pédagogiques et dispositifs à privilégier
La pédagogie des grands groupes renvoie à un ensemble de stratégies et de techniques qui favorisent la responsabilisation des élèves, leur socialisation et leur sens de l'entraide, de la coopération autant que leur participation à la construction du savoir . Parmi ces stratégies, on peut citer les «intergroupes» fondés sur le partage des tâches et des rôles dans le groupe, la participation, la collaboration et la concertation. Cette technique, basée sur l'interdépendance des membres du groupes, constitue en soi une initiation aux droits de l'homme. Cette approche peut être enrichie de la technique du «croquis-langage», qui permet d'identifier par l'image les droits énoncés dans la Déclaration universelle ou dans la Charte africaine, par exemple. L'album Dessine-moi un droit de l'homme publié par l'ÉIP est, à cet égard, un outil fort apprécié des éducateurs et des élèves.
Des approches culturelles de l'éducation aux droits humains permettent également de souligner, par exemple, les convergences entre la Déclaration universelle des droits de l'homme et la Charte Africaine. L'utilisation de proverbes, dictons devinettes, contes, jeux collectifs du patrimoine culturel africain montre que les droits de la personne ne sont pas étrangers à la culture africaine en général et sénégalaise en particulier.
Dictons et proverbes
Chez les Wolofs: «l'homme est le remède de l'homme»; «Si tu tournes le dos à ta culture d'origine, toute assimilation d'une autre culture est compromise»; «Chacun a son nom»; «Qui élève un animal doit lui donner sa nourriture». Chez les Mandingues:«Qui plante un arbre doit veiller à sa protection»; «La santé est la première richesse»; «Si le monde évolue, c'est parce que le savoir lui sert de support»; «Quand un homme n'est pas instruit, son champ de vision se rétrécit». Concernant la paix, les Mandingues disent: «L'homme belliqueux n'est pas bon voisin». Chez les Peuls: «C'est dans la paix qu'on songe à aller prier à la mosquée». Chez les Serères: «Qui n'a pas la paix errera» |
Le théâtre est aussi un puissant moyen d'information, de sensibilisation et de conscientisation aux droits humains. Aussi en est-il des jeux collectifs, tel le «jeu du baobab». Le conte peut être aussi un moyen d'éducation aux droits de l'homme; il faut cependant faire attention aux stéréotypes véhiculés par certains contes traditionnels (ex.: les filles sont faibles, jalouses; les hommes sont forts et courageux; les rois toujours bons; etc.)
Le foyer socio-éducatif est une structure entièrement gérée par les élèves. Leur droit à la libre expression est mis en valeur ainsi que leur capacité de participer à la vie de l'école. Plusieurs activités s'y déroulent: Club d'environnement, Club ÉIP, Club EVF (Éducation à la vie familiale), Club UNESCO, Club histoire-géographie etc....Tous concourent au sein du foyer à sensibiliser les élèves aux problèmes de l'heure (Sida, solidarité avec les plus démunis, environnement, droits Humains etc....). Ces clubs célèbrent aussi les journées nationales et internationales, ( le 10 décembre, journée internationale des droits de l'homme; le 16 juin, journée de l'enfant africain; etc..).À ces occasions, les élèves définissent les objectifs, identifient les activités à réaliser et procèdent à leur évaluation.
Le foyer socio-éducatif est également un lieu d'apprentissage de la démocratie. Des élections périodiques y sont tenues pour désigner le Président du foyer et les membres du Bureau. C'est également grâce à ce dispositif que les élèves expriment leurs doléances et formulent leurs revendications. Dans cette perspective, l'école n'est pas seulement un lieu où se donnent des cours, c'est aussi un front social des libertés où se préparent les célébrations autant que se vivent les crises.
Certaine activités sont conçues et mise en oeuvre dans le cadre du projet d'établissement ou de classe. Ce sont des échanges scolaires. Ils rapprochent des enfants et des adultes de cultures différentes. Ces échanges occupent une place importante dans la vie des établissements scolaires; ils fournissent l'occasion aux élèves de s'exprimer, d'aller à la rencontre de l'Autre.
Le journal scolaire, organe de formation, d'information et de communication est tenu par les élèves qui expriment leur préoccupations de l'heure (SIDA et solidarité, droits de l'enfant et de la femme). Cet outil permet en outre l'éclosion de jeunes talents tout en constituant moyen d'apprentissage de la citoyenneté.
Le Conseil consultatif est une structure de dialogue et de concertation entre partenaires de l'école; il favorise l'expression des élèves en sollicitant leur avis sur les questions scolaires.
Quelques zones d'ombre persistent néanmoins. Des progrès, certes, ont été réalisés quant au respect du droit à l'expression des élèves et à leur participation à la vie scolaire. Beaucoup cependant reste à faire, notamment au plan du règlement intérieur de l'école à l'élaboration duquel ni les élèves, ni les enseignants, ni les parents d'élèves ne sont associés à ce jour. Cela explique en bonne partie la raison des conflits qui éclatent à l'école entre élèves et administration.
III. Conclusion
La Déclaration universelle des droits de l'homme et la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples sont deux textes complémentaires. Les spécificités de la Charte enrichissent le corpus international des droits de l'homme. Il est clair cependant qu'on ne saurait transiger sur les principes. Ces textes devraient trouver leur place dans les programmes scolaires de tous les pays et dans toutes les disciplines (pas seulement en formation morale ou en formation civique).
Soulignons par ailleurs que, dans la pratique, les droits de l'homme sont peu enseignés au Sénégal. À notre connaissance, seule l'École de formation d'Instituteurs de Thiès - inscrite dans le réseau des «Écoles associées» de l'UNESCO - dispense des cours sur les droits humains dans le cadre de l'éducation à vocation internationale.
Pour que l'éducation aux droits de l'homme porte fruit, il faudrait, à notre avis, qu'elle soit présente au sein de toutes les matières au programme. Pour cela, il faut impérativement élaborer un programme minimal d'information et de formation aux droits de l'homme. Les apprentissages devront être de nature à inciter les élèves - au-delà des connaissances - à vivre les principes et les valeurs des droits de l'homme (solidarité, liberté, tolérance, égalité, justice, etc....) en classe, à l'école et même hors de l'école.
| Saliou Sarr enseigne l'École normale des instituteurs de Thiès, Sénégal et le corrrespondant de l'ÉIP-Sénégal. |
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