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Vues d'Afrique n° 2

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Le rôle de la femme dans la société africaine

Par Claire Hougan-Ayemonna

 


 

I. Le rôle de la femme dans la société

1.1 Le rôle traditionnel

Traditionnellement, le rôle de la femme se joue à la maison et la mission primordiale qui lui est assignée est celle de procréer. Dans les sociétés, communautés ou cultures où l'on estime qu'elle doit travailler, son rôle se limite à l'exécution des travaux domestiques et champêtres. En Afrique, elle n'a pratiquement pas de droit à part celui d'être bien entretenue par son époux (dans certaines régions, l'obésité d'une épouse en constitue le témoignage apparent et «incontestable).

Par contre, la femme a un nombre illimité de devoirs et d'obligations. Elle doit obéissance et soumission; elle doit se faire belle.

Elle doit assurer la pérennisation de la descendance par la procréation. Dans des sociétés où la polygamie est interdite, gare à elle si elle ne donne pas naissance à des enfants mâles! Elle a le devoir - sinon l'obligation - de fidélité alors que l'infidélité du mari est perçue comme une preuve de sa force, de sa virilité et de sa puissance. Elle n'a le droit ni de disposer, ni de jouir de son corps; d'où les pratiques de mariages arrangés ou forcés et de l'excision.

Encore de nos jours, il est fréquent de voir des couples - mêmes formés d'intellectuels - qui continuent d'avoir des enfants tout simplement parce qu'ils sont à la recherche d'un héritier mâle. Ils ne se posent pas la question de savoir s'ils parviennent déjà à subvenir aux besoins des enfants qu'ils ont déjà. Il s'agit là d'un comportement qui accentue la pauvreté et crée de réels problèmes de développement dans les pays du tiers-monde, particulièrement en Afrique

Marginalisation et mépris de la femme restent des phénomènes courants. Ceux-ci se traduisent également par la masculanisation persistante des termes qui désignent les fonctions qu'occupent les personnes jusqu'au plus haut niveau. Ainsi, par exemple, «Madame la juge» ou «Madame la professeure» continuent de sonner très mal à l'oreille de certains.

Tout se passe comme si ces fonctions n'avaient pas été prévues pour être exercées par les femmes. Heureusement, des changements de mentalité intervenus dans nos sociétés nous permettent d'envisager une nouvelle approche du rôle de la femme.

1.2 L'égalité pour les femmes, résultat de luttes

Par changements dans les rapports hommes-femmes, il faut entendre non seulement une évolution dans la tête des hommes de leurs représentations des modèles de comportement qu'ils espèrent voir adopter par les femmes, mais aussi la perception du rôle que la femme a d'elle-même . Il s'avérerait insensé pour cette dernière qu'elle se dise brimée, qu'elle réclame le droit à l'égalité sans qu'elle lutte pour s'insérer dans le processus actuel de développement et de démocratisation. Le passage du pouvoir d'une classe à une autre, d'une société à une autre, d'un groupement d'intérêts à un autre a toujours été une question de luttes ouvertes ou pacifiques. Ainsi en est-il, par analogie, des rapports hommes-femmes.

Par ailleurs, je me demande par moment si cette culture française, qui a étendu son influence dans les colonies devenues par la suite indépendantes, n'y soit pas pour quelque chose dans le fait que l'on continue à avoir du mal à accepter la réalité de l'égalité des sexes, beaucoup plus, en tous les cas, que dans les pays anglo-saxons, du moins me semble-t-il. La première femme africaine à occuper des fonctions de chef d'État, ne fut-ce que durant une courte période transition, fut au Liberia, pays anglophone. Les Philippines, qui ont connu une femme comme Présidente de la République durant tout un mandat, n'ont jamais été colonisées par la France.

Je ne dit pas cela pour qualifier la France d'État anti-progressiste vis-à-vis les femmes. C'est aussi bien la «culture française» que celle des États francophones d'Afrique - comme le Bénin - à qui je reproche d'être encore rétrogrades au sujet des questions relatives aux droits de la femme.

Il n'y a qu'à voir tout le tollé que soulève actuellement au Bénin, chez les hommes, les débats autour du projet de Code des Personnes et de la Famille , tout simplement parce que le texte, dans ses dispositions, consacre sur bien des points l'égalité réelle entre l'homme et la femme. Pourquoi le Bénin, qui se dit pays phare en matière de démocratie en Afrique, ne souscrirait-il pas aux principes les plus élémentaires de la démocratie que constitue l'égalité des citoyens sans distinction de sexe? N'obtiendrait-il pas, ce faisant, la reconnaissance de la communauté internationale?

II. Conclusion

Il convient de souligner que les militants et les militantes des droits de l'homme ont encore du chemin à parcourir en matière de promotion des droits de la femme afin de rendre effectif le principe de l'égalité des sexes, qui est un principe fondamental nécessaire à une société démocratique.

Il me semble que cette nécessité, nous, animateurs et animatrices d'ONG, promoteurs et défenseurs des droits de l'homme, nous ne l'avons pas encore tout à fait bien comprise. C'est ce qui peut expliquer que la situation de la femme, tant sur les plans politique, économique, social que culturel, semble demeurer stationnaire malgré tout l'effort que consentent les diverses associations, institutions et organisations étatiques et internationales ainsi que les discours «féministes» des hommes politiques.

Une dernière observation: s'agissant des droits de l'homme, pourquoi ne pas utiliser la majuscule dans «homme»? Le recours au «h» minuscule me paraît s'apparenter à une certaine ségrégation sexiste, pas toujours très loin du racisme. Pourquoi, d'ailleurs, ne pas parler tout simplement des droits de la «personne humaine»?

Claire Houngan-Ayemona est magistrate, animatrice du Centre Afrika Obota et coordonnatrice nationale du Réseau pour l'intégration des femmes des organisations non gouvernementales et associations africaines, cellule béninoise.
 

  

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